Jésus, réalité historique ou mythe ?

le Christ rédemteur à Rio

 

« une littérature comme celle de l’ Evangile ne s’invente pas non plus à partir de rien ».

Nous commençons cette présentation par cette citation de Thomas Römer, spécialiste de la Bible, qui enseigna d’abord à l’Université de Genève puis à celle de Lausanne avant d’être nommé depuis 2007, titulaire de la chaire “Milieux bibliques” au Collège de France et dont il devient l’administrateur en 2019. (cf pour écouter ses conférences au Collège de France)

Cette phrase d’un des grands historiens actuels de la Bible résume le fait essentiel que l’Evangile ne s’est pas construit à partir de rien. – je renvoie à l’article de Nicolas Weil écrit en 2014 sur  Le Monde -culture et idées en 2014

Il existe des détracteurs qui voudraient au contraire soutenir qu’il n’y a aucune vérité historique à l’existence de Jésus et que celui-ci n’est qu’un personnage mythique. Michel Onfray est sans doute l’écrivain français actuel très médiatisé qui défend cette thèse dans son livre Décadence où il s’en prend avec virulence au christianisme antique et à son héritage. La thèse d’Onfray a été combattue par Jean-Marie Salamito qui lui a répondu en 2017 dans son livre : Monsieur Onfray au pays des mythes. Jean -Marie Salamito, beaucoup moins médiatique qu’Onfray est normalien, agrégé de lettres classiques, et professeur d’histoire du christianisme antique à la Sorbonne (Paris-IV).  Les principaux arguments de l’auteur sont développés ici pour ceux qui veulent approfondir le sujet.

La controverse toujours renaissante du mythe Jésus étant évacuée, penchons nous sur les arguments historiques qui justifient, sur ce plan, la vérité de l’existence de Jésus.  Nous allons tirés la suite de cet article des propos  de Daniel Marguerat dans  son introduction à l’histoire du christianisme, Jésus de Nazareth. Daniel Marguerat est un   exégète et bibliste suisse, professeur émérite de théologie protestante de l’université de Lausanne, Jésus de Nazareth est l’introduction du tome 1 dont on peut lire ici un résumé- sur 14 tomes que constitue l’immense travail collectif de l‘Histoire du christianisme – Ce tome 1 est paru en 2000 sous la responsabilité de Luce Pietri aux Editions Desclée.

Daniel Marguerat, dans son introduction, présente  les diverses approches historiques qui témoignent sans aucun doute de l’existence effective de Jésus. Le résumé de son introduction est accessible ici.

Synthétisons son propos : Les deux provinces de Galilée et Judée qui voient, pour la première, la naissance de Jésus et la seconde, sa mort, sont durant cette période sous l’autorité de Rome depuis leur invasion par les légions de Pompée en 63 avant Jésus-Christ.

Durant la jeunesse et l’activité de Jésus,  Galilée et Judée connaissaient deux régimes différents : la Galilée était un royaume juif sous contrôle romain et la Judée vivait un régime d’occupation dirigé par un préfet aux ordres de l’empereur alors que le sanhédrin et et le grand prêtre s’occupaient des questions religieuses.

La date de naissance de Jésus est   incompatible avec la date de recensement du gouverneur de Syrie et on situe  donc plus exactement cette  date de naissance entre -7 et -4 av JC.

L’économie de la Galilée se compose alors avant tout d’agriculture et de pêche. La vie se polarise autour de riches propriétaires et petits paysans et journaliers.

L’activité de Jésus s’est déroulée pour l’essentiel  autour de Capharnaüm. C’ est un village de pêcheurs de Galilée, sur la rive nord-ouest du lac de Tibériade.  Jésus partageait alors la culture et les soucis des petits artisans, des paysans et des  pêcheurs.

L’un des faits les plus sûrs de la vie de Jésus est son baptême par Jean Baptiste  dans le Jourdain.  Jean Baptiste n’est pas une figure unique en son genre dans le judaïsme palestinien du Ier siècle où l’on observe une constellation de groupes messianiques protestataires axés sur un programme du renouveau.

Historiquement, Jean Baptiste fut le maître et Jésus le disciple. Jésus s’est associé étroitement au mouvement du Baptiseur avant de s’en séparer et  de conduire un ministère autonome.

Le baptême de Jean a une valeur sacramentelle.  L’unicité de son baptême tranche sur la répétition des rites d’ablution auxquels se soumettaient les juifs pieux notamment à Qumrân. Le fond du message de Jean est eschatologique. Il rompt avec la filiation  illusoire d’Abraham et il prescrit une rémission des péchés par le baptême, s’écartant ainsi des sacrifices expiatoires mis en place autour du Temple.

Son baptême vient du ciel et non des hommes ( interrogation de Jésus dans Marc 11, 30-32). Les raisons de la rupture de Jésus avec Jean nous échappent mais on peut relever quatre différences :

  • Jésus n’est pas un ascète contrairement à Jean qui pratique l’ascèse vestimentaire ( habit en poil de chameau) alimentaire ( sauterelles et miel sauvage) et domiciliaire ( vie au désert). Jésus au contraire est l’homme des foules et des villages.
  • Le Dieu de Jésus est un Dieu de la grâce, de l’amour sans limite qui aime les mauvais comme les bons ( Matthieu 5, 45)
  • Aucun geste thérapeutique n’est attribué à Jean alors que le miracle est une action forte de Jésus.
  • Jésus n’introduit pas la pratique du baptême dans son groupe que l’Eglise pourtant reprendra après lui. Jésus transfère le pardon dans le rapport à autrui et le ritualise par des gestes de communion et de compassion. Jean est crieur de l’aube et son baptême une offre de dernière minute alors que Jésus est un charismatique doué d’un exceptionnel pouvoir de rayonnement.

La vie de Jean le Baptiseur finit mal. Selon Flavius Josèphe, il fut exécuté à la forteresse de Machéronte sur ordre d’Hérodote Antipias gouverneur de Galilée pour avoir reproché à ce dernier son union avec Hérodiade.

Quant au préfet Pontius PilatusPonce Pilate -son portrait selon Flavius Josephe et Philon d’Alexandrie ressemble peu à celui arrangé des Evangiles.  Tout porte à penser qu’il fut partisan d’une répression sans faille et aussi l’agent zélé d’une stratégie romaine d’assimilation culturelle.

A la différence de ces hommes et mouvements, Jésus, malgré sa parenté avec ses mouvements, prit ses distances avec ceux-ci car il ne lie jamais ses actes à l’exode. Toute idée de reconquête du pays est exclue. L’état de disciple de Jésus n’est pas volontaire ni provisoire. Jésus n’est pas marié et exerce une activité nomade. Il est radicalement séparé de l’idéologie zélote par son éthique de non résistance à autrui ( Luc 6,27-36)

Au coeur du discours et de l’agir de Jésus se trouve une notion toujours présente mais jamais définie : le Règne de Dieu. Elle va de soi pour le judaïsme ancien et remonte aux Psaumes où s’exprime l’idée d’une royauté permanente et éternelle du Dieu d’Israël. Cette royauté universelle est magnifiée dans le culte céleste célébré par la cour des anges et reconnue dans le culte terrestre qui lui est rendu au Temple de Jérusalem.

Jésus ne fait que partager l’espérance commune de son temps en une venue future du Dieu-Roi. Elle se réalise déjà avec lui : pouvoir de chasser les démons qui lui vient de Dieu. La force de Dieu se coule dans l’agir de Jésus. Aux soixante-douze disciples qui lui rendent compte du succès de leur pratique Jésus répond : ” Je voyais Satan tomber du ciel comme l’éclair ” (Luc 10,18)

Une pratique thérapeutique,   . La vision de Jésus n’est pas fortuite et il s’agit de la pratique à laquelle il entraîne ses disciples.

Cinq types de miracles lui sont attribués : des guérisons allant jusqu’à la réanimation de morts, des exorcismes, des miracles justifiant une pratique (ex : transgression du sabbat), des prodiges de générosité  ( multiplication des pains) et enfin des sauvetages sur le lac.

Aucun de ces types de miracles n’est inconnu de la littérature gréco-romaine (ex : Appolonius de Tyane chez les Romains)  ou des écrits juifs (le rabbin  Honi ou Hanina ben Dosa)

Jésus ramène au présent ce que ses contemporains attendaient du futur. ( parabole du grain de moutarde (Matthieu 13, 31-32) et du levain ( Matthieu 13,33). Le règne de Dieu n’est pas vu comme une dynamique de progrès mais une structure de contraste. La grandeur future se voit dans la médiocrité des petits commencements. Jésus a  le regard sur l’actualité du Règne et non la fin des temps. En cela, il se sépare de la spiritualité apocalyptique : le règne est à découvrir “parmi vous”. Le miracle concrétise la venue du Règne et la parabole éclaire la mystérieuse présence de Dieu.  ( parabole du fils perdu, Luc 15, 11-32) , l’invitation au festin ( Luc 14, 16-24) le débiteur impitoyable ( Matthieu 18, 23-35), la parabole du Samaritain ( Luc 10, 30-37), le pharisien ( Luc 18, 9-14)

Nous avons parlé jusqu’ici de la dimension présente du Règne de Dieu dans la conscience. Mais les sources documentaires abondent en faisant état d’un Règne encore à venir : ” Père que soit sanctifié ton nom, que vienne ton Règne ” ainsi débute la prière dans laquelle s’exprime l’identité du groupe de Jésus ( Luc 11,1). Jésus s’est exprimé aussi sur le temps de la fin ( Marc 13)

Le futur du Règne comporte inévitablement, comme la tradition juive, un jugement divin portant sur les oeuvres des hommes.

Le Règne de Dieu n’est pas un segment de calendrier met une dynamique que Jésus met en branle. L’histoire bascule déjà, Dieu est à la porte. Aux temps nouveaux correspond la mise en place de comportements nouveaux.

Comment Jésus s’est-il situé ? A-t-il approuvé ou rejeté l’autorité de la Torah ?  La chrétienté subséquente se réclamera de lui pour soutenir deux points de vue opposés :

D’un côté, un courant critique envers la Loi, avec Paul et Marc qui propage un Evangile sans Loi.

D’un autre côté, Matthieu et Jacques qui maintiennent l’autorité de la Loi en régime chrétien. Quelle fut la position de Jésus ?

Observer les interventions de Jésus sur la question de la Loi donne lieu, d’emblée, à deux considérations.

Premièrement, les strates les plus anciennes de la tradition n’ont retenu aucune déclaration de Jésus sur l’autorité ou la validité de la TorahJésus s’est exprimé de cas en cas, s’inscrivant dans l’espace de reconnaissance de la Loi sans la problématiser comme telle.

Deuxièmement, la tradition a retenu le souvenir  de l’étonnement des foules : “parce qu’il les enseignait en homme qui a autorité et non comme les scribes. ( Marc 1,22). Jésus ne fonde pas d’école de la Torah et ne s’engage pas dans la réglementation casuistique que l’on appelle la halakah. (ensemble des prescriptions, traditions).

  1. Le principe de l’amour, 38.

Parce que Dieu “fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et les injustes” ( Matthieu 5, 45)

La Torah n’est donc pas à suivre par elle-même mais parce qu’elle sert l’amour. Cette focalisation culmine dans l’exhortation à aimer l’ennemi ( Matthieu 5, 43-48)

Jésus ne brise pas le monde de la Torah mais il répugne à dire : “Moïse a dit…” et met en avant son “Je” : “mais moi je vous dis …” ( Matthieu 5, 21-48)

Le primat de l’amour n’est pas qu’un discours, il oriente son comportement, notamment son choix de solidarité sociale et le recrutement de ses adhérents.

Jésus et son groupe

Jésus s’est rendu solidaire des catégories sociales que marginalisait la société juive  : enfants, collecteurs d’impôts, femmes, Samaritains, malades.

Jésus a choqué les pharisiens en frayant avec le “peuple de la terre”  ( ham ha-aretz   : juifs ruraux restés au pays alors que les classes aristocratiques et sacerdotales étaient déportées en exil à Babylone)

Au total, Jésus s’est rendu solidaire de toutes les marginalités sociales de son temps. Les repas de Jésus anticipent ce banquet de salut et dans la secte de Qumrân aussi, les repas communautaires étaient conçus comme l’anticipation du festin messianique.

Disciples et adhérents

Contrairement à l’image figée des douze disciples groupés autour du maître que dessinent les évangiles, l’entourage de Jésus se composait de trois cercles concentriques.

Le Dieu de Jésus

Quelle image de Dieu habite la conviction de Jésus ?

  • le Père qui secourt la détresse des souffrants
  • le Dieu du Règne qui accueillera au banquet eschatologique
  • le Dieu-juge qui rétribuera chacun selon ses oeuvres

Une face demande à être éclairée : Jésus  invite à ne pas se soucier du lendemain et prend l’exemple des oiseaux du ciel et des lys des champs. C’est une théologie de la création basée sur l’agir providentiel de Dieu.

Alors que la théologie pharisienne fait de la conversion le préalable de la réintégration du pécheur Jésus met en avant la grâce divine qui ne grève aucune condition. Ave Jésus, l’offre de la grâce surplombe  et déclenche l’appel à agir, non l’inverse. (invitation au festin Matthieu 22, 1-10) ; serviteur impitoyable ( Matthieu 22, 1-10) ; le serviteur impitoyable ( Matthieu 18, 23-35), le figuier ( Luc 13, 6-9)

L’éthique du sermon sur la montagne ( Matthieu (5-7) avec ses exigences immodérées à ne pas résister au méchant, à ne pas se soucier du lendemain, contredit le soin des sages et des rabbis. Jésus ne se range pas à cette politique de l’acceptable.

La crise et la croix

Après deux ou trois années en Galilée, Jésus décida, pour des raisons qui nous échappent, de monter à Jérusalem.

En s’approchant de la fin de cette dernière période de sa vie, l’historien voit la difficulté de son travail s’accroître. Plus qu’ailleurs, il importe de légitimer la lecture critique  des textes.

L’agression au Temple

La tradition la plus sûre place au début du séjour une altercation dans l’enceinte. Voici comment Marc la rapporte : Entrant dans le Temple, Jésus se mit à chasser ceux qui vendaient et achetaient dans le Temple ; il renversa les tables des changeurs et les sièges des marchands de colombes et il ne laissa personne traverser le Temple en portant quoi que soit… ( 11, 15b-17)

L’attentat de Jésus a clairement une portée symbolique. Laquelle ?  L’événement ne se produit pas dans le Temple mais dans son enceinte  appelée “le parvis des païens”, là où juifs et païens pouvaient se côtoyer. Ce parvis fonctionne comme un sas séparateur du pur et de l’impur, là où les fidèles se dépouillent de la monnaie romaine pour payer l’impôts du Temple en monnaie juive. On y achète aussi les animaux sacrificiels choisis selon des exigences codifiées.

Les motifs de la crise,

Les événements qui ont conduit à l’exécution de Jésus sont  entachés de nombreux points d’obscurité.

Un point sur lequel concordent les sources chrétiennes et juives est celui-ci : la peine fut romaine et la sentence délivrée par le préfet Ponce Pilate mais l’initiative d’arrêter Jésus émane de l’autorité juive. Mais le Sanhédrin, conseil supérieur de la nation, s’est-il réuni en session officielle, avaient-t-il les compétences et quels griefs sont invoqués contre Jésus ?

Pour les premiers chrétiens nul doute que l’accusation porte sur la messianité de Jésus ( Marc 14, 53-65 et 61-64)

L’identité messianique de Jésus lui fut attribuée après coup par les premiers chrétiens. Les griefs devaient faire l’unanimité du Sanhédrin contre Jésus. On sait qu’Anus fut déposé de sa fonction de grand prêtre pour avoir condamné Jacques, frère de Jésus, sans l’assentiment total du conseil, c’était en 62. Or le grand prêtre Caïphe resta grand prêtre 19 ans de 18 à  36. Pareille erreur ne lui ressemble pas.

Les deux griefs capables de faire l’unanimité du Sanhédrin contre Jésus sont d’abord son attitude au Temple et d’autre part sa position sur la Loi. C’est d’ailleurs ces griefs  qui seront retenus contre Etienne.

Le procès, la sentence, le supplice

Le gouverneur romain suivit la procédure judiciaire habituellement appliquée en province et connue sous le nom de “cognito  extra ordinem“. Cette procédure donnait d’abord la parole au plaignant, ici les autorités juives issues de l’aristocratie et des rangs sadducéens. Il n’y a aucune mention de la participation des pharisiens.

Les plaignants signalent à Pilate les actes que les Romains réprouvent : troubles à l’ordre public en fonction d’une prétention messianique.

La parole était ensuite donnée à l’accusé : Jésus se tut et son silence décontenança Pilate. ( Jn 19, 9)

Pilate ne tenait pas à servir les caprices des chefs juifs qu’il détestait cordialement. Il offrit donc de libérer un prisonnier à l’occasion de la fête juive pascale. et offrit le choix entre Jésus de Nazareth qu’il espérait ainsi libérer et le zélote Barabbas qui se prénomme aussi JésusMt 27, 17).

La foule, survenue sur ces entrefaites, déjoue ses plans. Il feint de céder à la foule et conclut à la sentence de mort pour Jésus. L’écriteau indicateur du délit , le titulus  porte la mention : INRI, Jésus le Nazaréen, roi des juifs.

Selon la tradition, Jésus a été battu de verges  et une mise en scène qui parodiait les fêtes saturnales où l’on couronnait un roi tiré au sort qui remit au prisonnier les emblèmes d’une royauté de carnaval : tunique de pourpre, roseau en guise de sceptre, couronne d’épines.

Jésus a été chargé de la croix, non toute la croix mais vraisemblablement la partie transversale comme pour les autres condamnés. La partie verticale étant fichée en terre sur la colline du Golgotha, hors de la ville. Jésus a faibli en chemin et fut remplacé par Simon de Cyrénaïque-cf Cyrène -qui rentrait des champs pour la fin du parcours ( Marc 15, 21)

La découverte historique, dans un ossuaire de Jérusalem, des restes d’un crucifié, permet de penser que Jésus a été pendu par trois clous, deux plantés aux avant- bras et non dans les mains, qui ne supporteraient pas le poids du corps, et un plus long à travers les talons joints. L’agonie pouvait être longue mais celle de Jésus fut brève. ” Mon Dieu, mon Dieu, en vue de quoi m’as -tu abandonné” ( Psaume22,2) est sans doute de composition tardive. La mort de Jésus n’eut d’extraordinaire que sa rapidité et on eut juste le temps d’ensevelir Jésus avant le coucher du soleil car les familles se préparaient à partager le repas pascal.

Pâques, une expérience visionnaire

Jésus est-il ressuscité ?  L’historien n’est en mesure ni de l’infirmer ni de le confirmer. Les sources documentaires sont exclusivement chrétiennes et les évangiles ne décrivent jamais le phénomène de la résurrection.

Pour un historien, cet événement est spirituel. En revanche ses effets entre dans le champ de sa compétence. Témoins d’un événement complétement inattendu d’eux, les disciples répètent que celui que les hommes ont pendu au bois, Dieu l’a relevé et lui a conféré le nom de Seigneur ( Actes 2;23-24 ; 3,14-15 ; 4,10 ; 5, 30 ;10, 39-40 ; 13, 27-31). Pâques va désormais fonctionner comme le point focal des relectures de l’histoire de Jésus. Paroles et gestes du prophète sont interprétés à partir de l’effet pascal.

La question qui devient primordiale, sur le  coup, est celle de l’identité de Jésus : qui était cet homme pour que Dieu le relève des morts ?

En quête de l’identité de Jésus,

Les sources documentaires nous placent devant ce paradoxe ; d’un côté sa prédication du Règne et son interprétation de la Torah laissent transparaître une très nette revendication d’autonomie ; d’un autre côté, Jésus fait silence sur son identité.

Jésus s’est-il déclaré Messie c’est à dire Christ ? Les Evangiles lui attribuent une réponse différée sauf dans son procès au Sannhédrin ( Marc 14, 62) . L’homme s’efface derrière l’événement qu’il fait éclore.  L’annonce de l’irruption du Règne prend le pas sur toute forme de prétention messianique. Sa prétention est millénariste.

Épilogue: la mémoire de l’origine 

Notre étude sur Jésus de Nazareth  a commencé par poser le paradoxe qui la rendait nécessaire : d’un côté, on ne peut parler de “christianisme ” qu’après Pâques et d’un autre, l’histoire du christianisme ne saurait faire l’impasse sur l’histoire originaire qu’est l’histoire de Jésus.

En préservant et en canonisant quatre évangiles, l’Eglise primitive n’a pas seulement voulu fixer un souvenir historique mais elle a voulu surtout sanctionner un choix théologique : l’identité du Christ ne peut être saisie en dehors d’une narration qui restitue la vie de Jésus, ses faits et gestes. En régime chrétien, la référence au Jésus terrestre constitue le lieu de vérification obligé de toute parole de salut.

En canonisant quatre évangiles, l’Eglise ratifiait la pluralité  des accès au Jésus terrestre et l’impossibilité de revendiquer une lecture unique de la vie de Jésus.

 

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